Gérer une succession à l’étranger pour les Suisses expatriés : droits, fiscalité et conseils pratiques
Gérer une succession transfrontalière : cadre et enjeux pour les Suisses expatriés
La question de l héritage évolue en Suisse et à l étranger. Pour la Suisse, les données montrent une hausse des héritages au cours des trois dernières décennies, les chiffres s étant accrus deux fois plus rapidement que les salaires. Selon les estimations de l Université de Lausanne, la somme totale pourrait atteindre 100 milliards de francs cette année.
Règles et procédures liées à la succession en Suisse ne sont pas toujours simples. Pour les quelque 800 000 Suisses établis à l étranger, la répartition du patrimoine au-delà des frontières s accompagne de défis juridiques et fiscaux supplémentaires, qui viennent s ajouter aux questions familiales et financières. Préparer et organiser sa succession peut permettre d éviter bien des complications pour les proches.
Un lecteur de Swissinfo partagé son expérience d une procédure successorale éprouvante, listant les obstacles rencontrés : « Les délais avec lesquels les banques traitent les démarches après la publication du testament ; les demandes répétées de remboursement de l impôt à la source, malgré une convention fiscale entre la Suisse et le pays de résidence ; les difficultés à ouvrir et gérer un compte bancaire en Suisse lorsqu on vit en dehors de l Europe. »
Cadre juridique et points clés du droit successoral international
Depuis le 1er janvier 2025, la Suisse applique de nouvelles règles relatives au droit successoral international, en réponse à l accroissement des relations internationales entre personnes et patrimoines.
En principe, le droit applicable est celui du dernier domicile habituel du défunt. Pour les Suisses vivant à l étranger, cela correspond généralement au droit du pays de résidence. Toutefois, la loi nouvelle permet, pour les Suisses résidents à l étranger et pour les personnes ayant une double nationalité, d envisager l application contraignante du droit successoral suisse dans leur testament.
Cette option peut faciliter la planification successorale et clarifier qui hérite. Néanmoins, tous les pays ne reconnaissent pas cette règle. Il est donc indispensable de se renseigner auprès des autorités compétentes du pays de résidence avant d adopter ce choix.
Il faut aussi savoir que le droit successoral suisse ne permet pas de contourner la réserve héréditaire : les parts réservataires pour les enfants et le conjoint survivant demeurent protégées, même lorsque l on applique le droit suisse.
Par ailleurs, le droit successoral peut s appliquer différemment selon les catégories de biens. Par exemple, les biens immobiliers situés en France relèvent automatiquement du droit français. Dans certaines régions d Italie, la situation peut se compliquer en raison d un système d inscription foncière particulier, connu sous le nom de tavolaire.
Dans l extrait du documentaire Wir Erben, la famille Baumann se réunit dans la ferme familiale du sud-ouest de la France pour évoquer les enjeux de la succession.
La question des impôts et des règles fiscales
Les exemples ci-dessus illustrent les nombreuses réglementations locales qui peuvent influencer une succession transfrontalière. Au-delà du droit applicable, le traitement fiscal de la succession joue un rôle central.
En Suisse, l impôt sur les successions est géré au niveau cantonal. Pour les successions situées à l étranger, l imposition se fait généralement dans l État de domicile du défunt, et la succession peut être imposée comme patrimoine en Suisse.
Le risque de double imposition existe, car plusieurs États peuvent percevoir des impôts sur la même succession. La Suisse n a conclu que peu de conventions de double imposition dans ce domaine, notamment avec l Allemagne, l Autriche, la Suède, les États‑Unis et le Royaume‑Uni. D autres pays, notamment la France, ne bénéficient pas d une CDI en la matière.
Pour les biens hérités introduits en Suisse depuis l étranger, une exonération de droits de douane peut s appliquer jusqu à une valeur de 100 000 francs. Au-delà, une déclaration auprès de l Administration fédérale des douanes est nécessaire, suivie d une autorisation d importation.
Étant donné la complexité du sujet, il est fortement conseillé de recourir tôt à une aide spécialisée en droit successoral international. Les ambassades et les consulats suisses peuvent apporter des informations initiales et présenter des listes de professionnels locaux compétents.