« La bonne mère » de Mathilda di Matteo : un premier roman acéré sur les liens familiaux et les classes sociales
Une narration sincère mêlant humour et réalité sociale
Dans son premier roman, Mathilda di Matteo explore avec subtilité la relation mère-fille à travers un récit empreint d’humour et de verve. La mère, Véro, dépeinte comme une Marseillaise au tempérament flamboyant, se remémore l’arrivée de sa fille Clara, de retour à Marseille pour présenter son ami Raphaël. Issu de la bourgeoisie parisienne et diplômé de Sciences Po, ce dernier est rapidement désigné par Véro comme un jeune homme un peu trop « propre sur lui », qu’elle surnomme d’un trait « le girafon ».
Une double identité linguistique au cœur du récit
Le roman joue habilement sur le contraste entre le langage de Véro, incarnant la marseillaise typique, et celui de Clara, qui a cherché à effacer son accent lorsqu’elle a quitté Marseille pour Paris. Mathilda di Matteo ne se limite pas à l’effet comique créé par cette confrontation linguistique, mais dresse également un portrait de personnages riches en nuances, notamment à travers l’inventivité de Véro dans ses insultes et ses expressions colorées.
Une œuvre qui dévoile des facettes complexes des relations familiales et sociales
Pouvant rappeler la citation d’une autrice américaine, Vivian Gornick, le livre souligne une relation mère-fille à la fois exclusive, intense et féroce. L’autrice parvient également à donner vie à un personnage de père, chauffeur de taxi, surnommé « le Napolitain » par son épouse, porteur d’une infinie tristesse et d’une présence silencieuse jusqu’au cœur du récit.
Une critique du patriarcat et de la violence de classe
À travers le parcours de Clara et ses interactions avec Raphaël, Mathilda di Matteo propose une fresque précise de la violence sociale et de la signification des classes. Son roman constitue également une forme de réappropriation féministe de la figure de la « cagole », une femme qui revendique une féminité affirmée, décomplexée et détachée des normes traditionnelles.
Une féminité revendiquée et une ode à la sororité
Selon l’autrice, la « cagole » incarne une féminité intense et hors des sentiers battus, mêlant des codes masculins à une expression forte, parfois brutale, sans nécessité de s’excuser d’occuper l’espace public. Le récit montre aussi que la violence patriarcale traverse toutes les classes sociales et territoires, tout en mettant en avant la solidarité entre femmes, cagoles comme intellectuelles, dans des luttes communes.
Une auteure à l’art du portrait et à la sensibilité sociale
Après avoir étudié à Sciences Po Paris, Mathilda di Matteo revient s’installer à Marseille, où elle déploie un talent particulier pour dresser le portrait de personnages complexes, évitant toute caricature. Elle réserve à chacun une part d’ombre, enrichissant son récit d’une profondeur psychologique notable.
« La bonne mère », publié aux éditions L’Iconoclaste en août 2025, confirme la vocation de la jeune autrice à dépeindre avec finesse les enjeux sociaux et familiaux contemporains dans une prose à la fois sincère et engagée.